Les points chauds de la semaine 43 (2023)
Les "points chauds", c'est une sélection d'actualités climatiques qui ont marqué la semaine précédente. Retour sur la semaine du 23 au 29 octobre 2023.
RAPPORT ALARMANT DE L’ONU SUR DES “POINTS DE BASCULE” ENVIRONNEMENTAUX
Très utilisé par les scientifiques, qui travaillent activement sur cet enjeu, le terme de “points de bascule” (de l’anglais tipping points), aussi décliné en “points de basculement” ou “points de rupture” est un grand classique du lexique climatique. Introduit par le GIEC dans son rapport de 2001, il est défini comme « un seuil critique au-delà duquel un système se réorganise, souvent brusquement et/ou de manière irréversible ». Parmi ces fameux “points de bascule” : le dégel du permafrost, la disparition des récifs coralliens, la déforestation en Amazonie ou encore l’effondrement de la calotte glaciaire du Groenland. Dans un rapport publié le 25 octobre, l’Université des Nations Unies (UNU) introduit un nouveau concept dérivé : les « points de bascule de risques » environnementaux. “En extrayant sans discernement les ressources en eau, en endommageant la nature et la biodiversité, en polluant à la fois la Terre et l’espace tout en réduisant les possibilités de faire face aux catastrophes, les actions humaines introduisent de nouveaux risques et amplifient ceux existants” décrypte l’ONU. Dans le cadre de ce rapport, six points de bascule de risques ont été identifiés et sélectionnés “pour leur représentation des grands problèmes mondiaux”.
Il s’agit de l’accélération des extinctions d’espèces, de l’épuisement des eaux souterraines, de la fonte des glaciers de montagne, de l’intensification de la chaleur extrême, de l’accumulation des débris spatiaux et de la menace représentée par un futur de moins en moins assurable. Le rapport rappelle par exemple que l’extinction d’une seule espèce fortement connectée aux autres dans un écosystème donné peut déclencher des extinctions en cascade, ce qui peut conduire à l’effondrement de cet écosystème. Dans le cas des débris spatiaux et de l’encombrement grandissant de l’orbite terrestre, une seule collision pourrait en provoquer d’autres et finalement compromettre les activités spatiales, dont la capacité humaine à surveiller les changements météorologiques et environnementaux. Un large volet du rapport est consacré aux réponses qui peuvent être apportées à ces risques. Ces solutions sont classées en deux catégories, selon qu’elles soient à visée évitante ou adaptative. Au sein de ces solutions, sont différenciées les actions qui s’inscrivent dans le système actuel et celles qui cherchent à le transformer. Exemple cité par l’AFP : face à l’augmentation des températures, l’installation de climatiseurs est une solution d’adaptation au sein du système, tandis que la réduction des émissions de gaz à effet de serre cherche à le transformer, en visant la cause du problème. Sans surprise, le rapport de l’UNU pointe le fait que ces actions transformatives sont aujourd’hui insuffisamment prises en compte par les gouvernements.
PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT : LE DROIT DES GENERATIONS FUTURES RECONNU PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
C’était une décision attendue, au-delà même du seul cercle des initiés au droit de l’environnement. Le 27 octobre, le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d’Etat à la suite de la dépose d’un recours par des ONG environnementales, était amené à se prononcer sur le projet Cigéo (pour Centre de stockage industriel géologique). Déclaré d’utilité publique par le gouvernement mais fermement rejeté par les milieux écologistes, celui-ci prévoit l’enfouissement et le stockage en profondeur d’au moins 83.000m3 de déchets nucléaires à Bure, situé à l’extrême-sud de la Meuse à proximité immédiate de la frontière avec la Haute-Marne. Grâce à des caractéristiques géologiques considérées comme propices, c’est en effet ce site, où se trouve déjà un laboratoire de recherche souterrain, qui avait été choisi en 2005 par l’Andra (l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) pour accueillir, à partir de 2030, les déchets nucléaires les plus dangereux et dont la radioactivité durera à minima des dizaines de milliers d’années. Les ONG à l’origine de la saisine du Conseil constitutionnel, dont Greenpeace, France Nature Environnement ou encore le réseau Sortir du nucléaire, estimaient que le stockage des déchets constituait une entrave au droit des générations futures et n’était pas conforme à la Constitution, notamment au préambule de la charte de l’environnement qui est un texte de valeur constitutionnelle.
C’est donc ce point relatif à une menace qui pèserait sur les générations futures que les Sages de la rue de Montpensier ont été amenés à clarifier. En l’espèce, dans une réponse longue et motivée, le Conseil a considéré que la mise en oeuvre du projet Cigéo ne contrevient pas au droit des générations futures “compte tenu” des “garanties” apportées. Elle a donc été jugée conforme à la Constitution. Toutefois, le Conseil constitutionnel a acté de manière inédite que “lorsqu’il adopte des mesures susceptibles de porter une atteinte grave et durable à un environnement équilibré et respectueux de la santé, le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins, en préservant leur liberté de choix à cet égard”. Interrogée par 20 Minutes, Emilie Gaillard, enseignante-chercheuse en droit privé à Science Po Rennes, salue une “avancée majeure”. “Cette notion de générations futures existait déjà dans nos textes législatifs. Mais on ne leur avait pas reconnu jusque-là des droits constitutionnels. C’est ce qu’a fait le Conseil constitutionnel en estimant que l’article 1er de la Charte de l’environnement, qui a une valeur constitutionnelle, valait aussi pour les générations futures. Cet article rappelle le droit de chacun de vivre dans un environnement sain et équilibré. Ce lien qui a été fait est une première en France” estime Mme Gaillard.
Il y a trois ans, le Conseil Constitutionnel avait jugé que la protection de l’environnement ne s’arrêtait pas aux frontières françaises. Cette fois, il reconnait donc qu’elle concerne également les générations futures. Or, “les droits des générations futures sont en jeu dans quasiment tous les risques existentiels de l’humanité” rappelle Emilie Gaillard, citant “le nucléaire avec ses déchets, le climat, la pollution chimique, le recours aux pesticides, les perturbateurs endocriniens”. “Ça ne va pas se faire en un trait de temps, mais cette décision ouvre une brèche” considère la chercheuse, qui travaille spécifiquement sur cette question du droit des générations futures. En 2021, dans un arrêt historique, “le tribunal constitutionnel fédéral allemand avait donné raison à des plaignants qui attaquaient l’État sur l’insuffisance de ses engagements climatiques, susceptible d’obérer l’avenir” rappelle-t-elle. D’autres juridictions étrangères, en Colombie et dans certains Etats américains, ont également considéré le droit des générations futures en matière de protection de l’environnement.
ETATS-UNIS : UN CLIMATOSCEPTIQUE À LA PRÉSIDENCE DE LA CHAMBRE DES REPRESENTANTS
Le 25 octobre, Mike Johnson est devenu le 56e président de la chambre des représentants, la chambre basse du congrès américain où le parti républicain détient une courte majorité depuis les élections de 2022. Originaire de la Louisiane, cet élu ultra-conservateur inconnu du grand public a une faible expérience politique derrière lui, siégeant au congrès seulement depuis 2016. L’arrivée de cet inconnu du grand public au poste de “speaker”, le nom usuel donné à la fonction de président de la chambre des représentants, n’avait rien d’une évidence. L’homme a été désigné au terme de 3 semaines rocambolesques d’une crise sans précédent au sein du parti républicain. Trumpiste pur jus, il succède à Kevin McCarthy, évincé début octobre par l’aile droite de son propre parti. Un événement politique inédit aux Etats-Unis : jusqu’à présent, jamais un speaker n’avait été destitué. Contrairement à M. McCarthy, M. Johnson a la confiance de la frange trumpiste du Grand Old Party mais l’enjeu consistera aussi pour lui à ne pas trop froisser les républicains modérés. Occupant désormais un poste crucial au sein de la vie politique américaine, ce chrétien évangélique, qui cite la Bible à la moindre occasion, est désormais le troisième personnage de l’Etat après le président (Joe Biden) et la vice-présidente (Kamala Harris). M. Johnson fait partie de ceux qui ont activement participer à la tentative de renversement de l’élection présidentielle de 2020. « C’est quelqu’un qui s’est engagé jusqu’au cou dans le déni électoral, et cela n’augure rien de bon pour ce qui risque de se passer à la Chambre » a commenté Austin Sarat, un professeur de droit et de sciences politiques, dans le Washington Post.
M. Johnson ne présente pas non plus un profil susceptible de mettre le pays (historiquement) le plus pollueur de la planète sur de bons rails. Le New York Times rappelle qu’il a notamment “remis en question la science du climat, s'est opposé aux énergies propres et a reçu plus de contributions de campagne de la part des sociétés pétrolières et gazières que de toute autre industrie l'année dernière”. Le quotidien américain souligne également qu’il a systématiquement voté “contre des dizaines de projets de loi et d’amendements sur le climat”. À l’inverse, il a voté en faveur de mesures qui réduiraient le financement de l’Agence de protection de l’environnement (EPA). En 2017, M. Johnson avait reconnu le changement climatique mais avait insinué que c’est une modification des cycles naturels qui en est la cause, ce qui est un déni de la science du climat. "Cela devrait nous inquiéter tous qu'une personne aux opinions aussi extrêmes et si redevable à l'industrie des combustibles fossiles ait un tel pouvoir et une telle influence à une époque où une action audacieuse est plus nécessaire que jamais" a commenté Ben Jealous, directeur exécutif du Sierra Club, l’emblématique association environnementale fondée par John Muir. L’annonce de son élection en tant que speaker a en revanche été saluée tant par l’Independent Petroleum Association of America, un groupe de pression formé par les producteurs de pétrole et de gaz aux Etats-Unis, que par Steven Milloy, figure nationale du négationnisme climatique.
ETATS-UNIS : NOUVELLE MÉGA-TRANSACTION DANS LE SECTEUR PÉTROLIER
C’était l’un des points chauds de la semaine 41 : le 11 octobre, ExxonMobil annonçait son intention de racheter Pioneer Natural Resources, un producteur de pétrole et de gaz de schiste, pour près de 60 milliards de dollars (56 milliards d’euros). Deux semaines plus tard, la réplique est venue de Chevron, l’autre super-major pétrolière américaine. Le 24 octobre, la compagnie a annoncé vouloir acquérir Hess, anciennement Amerada-Hess, un producteur américain de pétrole. L’opération est envisagée moyennant un coût de 53 milliards de dollars (près de 50 milliards d’euros), soit la plus lourde de l’histoire de Chevron. Les transactions envisagées par les ExxonMobil et Chevron, deux mastodontes américains de l’industrie pétro-gazière, sont prévues aboutir au premier semestre de l’année 2024. “À rebours de la lutte contre le réchauffement climatique, elles répondent en apparence à la même logique : continuer à tirer profit autant que possible des hydrocarbures (pétrole et gaz), la demande mondiale étant encore en croissance” écrit le journal Le Monde. En s’offrant Hess, Chevron ajoutera notamment à son portefeuille un important champ pétrolier situé dans les eaux du Guyana, en Amérique du Sud. Le pays, riverain du Brésil, est le 4e producteur mondial de pétrole offshore. “Il est devenu un producteur majeur ces dernières années, avec des géants pétroliers, dont ExxonMobil, le chinois CNOOC et Hess, qui se livrent une concurrence acharnée pour les champs de pétrole très lucratifs du nord de l'Amérique du Sud” note Associated Press.
L’AGENCE INTERNATIONALE DE L’ENERGIE APPELLE AU TRIPLEMENT DES CAPACITÉS D’ENERGIES RENOUVELABLES D’ICI À 2030
Dans son rapport annuel publié le 24 octobre et intitulé “Perspectives énergétiques mondiales 2023”, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) rappelle que la demande de combustibles fossiles devrait rester “bien trop élevée” pour respecter l’objectif de l’accord de Paris consistant à limiter la hausse des températures mondiales à +1,5°C par rapport aux niveaux pré-industriels. Selon l’AIE, infléchir la courbe des émissions sur une trajectoire cohérente avec cet objectif reste “possible mais très difficile”. Pour que le monde se place sur la bonne voie d’ici à 2030, l’AIE a identifié différents impératifs à respecter dans le laps de temps restant, parmi lesquels le triplement des capacités d'énergies renouvelables, le doublement du taux d’amélioration de l’efficacité énergétique, la réduction de 75% des émissions de méthane provenant des opérations liées aux combustibles fossiles ou encore “des mesures visant à garantir un déclin ordonné de l’utilisation des combustibles fossiles”. À ce titre, l’AIE cite explicitement la fin des constructions de nouvelles centrales à charbon. Autant de mesures qui pourraient “constituer la base d’une COP28 réussie sur le changement climatique”, estime l’agence. Enthousiasmée par les progrès constatés dans le déploiement du solaire et dans l’électrification des véhicules, celle-ci table désormais sur un pic de la demande en énergies fossiles dès avant 2030 pour chacun des trois combustibles fossiles : charbon, pétrole et gaz. “La transition vers une énergie propre est en cours dans le monde entier et elle est inarrêtable. La question n’est pas tant de savoir ‘si’ mais ‘quand’, et le plus tôt sera le mieux pour nous tous” a déclaré Fatih Birol, le directeur exécutif de l’AIE. “Compte tenu des tensions et de la volatilité actuelles sur les marchés énergétiques traditionnels, les affirmations selon lesquelles le pétrole et le gaz représentent des choix sûrs pour l'avenir énergétique et climatique du monde semblent plus faibles que jamais” a-t-il également ajouté.
ACAPULCO DEVASTÉE PAR L’EXPLOSION NON-ANTICIPÉE DE L’OURAGAN OTIS
Otis est un nom qui restera longtemps gravé dans la mémoire des habitants d’Acapulco au Mexique et dans celle de nombreux experts-prévisionnistes. Ce nom avait été attribué le 22 octobre à ce qui ne devait être qu’une banale tempête tropicale formée dans les eaux du Pacifique. Problème ? Les modèles informatiques de prévision s’étaient trompés et, le 25 octobre, c’est un ouragan dévastateur de catégorie 5 - la plus élevée sur l'échelle de Saffir-Simpson - qui a déferlé sur Acapulco, métropole de plusieurs centaines de milliers d’habitants. La station balnéaire autrefois plébiscitée par les célébrités américaines a été balayée par des vents soufflant à plus de 270 km/h. Les dégâts enregistrés dans la ville sont colossaux. Selon les autorités, 220.000 habitations présentent des dégâts sur les 224.000 recensées à Acapulco. Quant au bilan humain, il fait officiellement état de près d’une cinquantaine de morts mais la fiabilité de ce chiffre est mise en doute au Mexique, où le président Andrés Manuel López Obrador a activement tenté de minimiser les dégâts causés par l’ouragan. Outre les décès confirmés, 58 personnes sont considérées comme portées disparues. Compte tenu de l'ampleur des dégâts, les conséquences d'Otis risquent de planer encore longtemps sur Acapulco, à peine remise du traumatisme qu'avait constitué l'ouragan Pauline en 1997. Ce cyclone tropical de catégorie 4 avait causé la mort de plus de 200 personnes dans la cité située dans le Guerrero.
L’intensification rapide de l’ouragan Otis, qui a complètement échappé aux modèles, correspond exactement à ce que le chercheur Kerry Emanuel nomme “le cauchemar du prévisionniste”. L’expression était mentionnée dans les points chauds de la semaine 42 à propos de la publication d’une étude qui rapportait des taux accrus d'intensification rapide des ouragans observés dans l'Atlantique-Nord. Otis, lui, se classe désormais comme l’ouragan du Pacifique le plus intense à n’avoir jamais concerné le Mexique. Son intensification extrêmement rapide - Otis est passé de la catégorie 1 à la catégorie 5 en moins de 12 heures - est uniquement dépassée (de peu) dans cette zone du Pacifique par celle de l’ouragan Patricia en 2015. Dans une analyse pointue pour le site Yale Climate Connections, Jeff Masters et Bob Henson, un scientifique et un journaliste experts en événements extrêmes, ont rappelé que “la recherche souligne qu'une intensification rapide des ouragans est susceptible de se produire beaucoup plus souvent dans un futur climat plus chaud". Auteur pour le site américain The Eyewall, le météorologue Matt Lanza a, lui, commenté : "Comment tous les modèles fiables que nous utilisons ont-ils pu manquer cela ? Ce sera aux étudiants diplômés et aux chercheurs de répondre dans les années à venir, car je n'en ai aucune idée formelle" . "Le travail à accomplir pour comprendre Otis prendra du temps, mais nous verrons certainement de nombreux articles de recherche dans les années à venir" a ajouté M. Lanza, non sans rappeler les considérables améliorations apportées aux modèles ces dernières années et leur bonne fiabilité générale.
LA FONTE DE LA GLACE DE L’ANTARCTIQUE-OUEST CONSIDÉRÉE COMME “INÉVITABLE”
Une mauvaise nouvelle de plus du côté de l’Antarctique. Selon une étude parue le 23 octobre dans la revue Nature Climate Change, la fonte accélérée des glaces provoquée par le changement climatique d’origine humaine dans l’ouest de l’Antarctique est “inévitable”. Et ce quelle que soit l’ampleur de la réduction des émissions de carbone. En d’autres termes : même dans le meilleur des cas, soit une action climatique forte qui correspondrait au respect de l’objectif de l’accord de Paris de contenir la hausse de la température planétaire à +1,5°C, la fonte de la calotte glaciaire de l’Antarctique ouest ne peut plus être stoppée. "Il semble que nous ayons perdu le contrôle de la fonte de la plate-forme de glace de l'Antarctique occidental au cours du 21e siècle", a déclaré Kaitlin Naughten, modélisatrice des océans au British Antarctic Survey et auteure principale de l’étude. “La fonte de la plate-forme de glace de l'Antarctique occidental est l'un des impacts du changement climatique auquel il faudra nous adapter, ce qui signifie très probablement une élévation du niveau de la mer que nous ne pourrons pas éviter” a ajouté la chercheuse, citant le risque de devoir abandonner certaines villes côtières. À elle seule, la fonte de la glace dans cette région bordée par la mer d’Amundsen, dont les eaux se réchauffent de manière plus rapide que prévu que ce qui avait été envisagé par les modèles, pourrait conduire à terme, soit bien au-delà du siècle actuel, à une hausse globale du niveau marin de plus de 5 mètres. “Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour l’ouest de l’Antarctique, et cela ne me surprend pas. Le taux de retrait de ces glaciers est le plus fort au monde. L’accord de Paris est un pas dans la bonne direction, mais ce ne sera pas suffisant pour éviter la poursuite de ce retrait”, a commenté dans Le Figaro Éric Rignot, chercheur au Jet Propulsion Laboratory (Nasa/Caltech) et professeur à l’université de Californie, à Irvine (États-Unis), qui n’a pas contribué à cette étude.
Pour Mathieu Casado, chercheur CNRS au LSCE (Laboratoire des sciences du climat) cité dans Le Monde, “ces résultats révèlent l’influence du changement climatique dans cette zone avant 2045. Et on constate que les échéances que l’on croyait lointaines, 2050, 2100, arrivent très vite. Tout cela met en lumière la globalité des impacts puisque, dans tous les scénarios, ils vont toucher cette zone très isolée”. Dans Le Figaro, le même chercheur juge que ce travail devrait contribuer à inciter à plus “d’efforts d’adaptation pour les régions et les villes du littoral, notamment en France en Vendée ou à La Rochelle”. Pour M. Casado, cette publication est “très importante, notamment pour la communauté scientifique” car “elle démontre que l’on est rattrapé par les actions du passé. La région de l’Antarctique Ouest est déjà très exposée au réchauffement”. Le chercheur insiste sur l’importance de “maintenir des objectifs ambitieux pour l’atténuation”, rappelant que, “avec des couches de glace beaucoup plus épaisses”, la partie Est de l’Antarctique pourrait mieux résister. Régions clés de la recherche sur le climat, les zones polaires présentent un intérêt décisif pour les scientifiques. Chaque étude de ce type permet de souligner un peu plus l’impératif d’une action politique pour le climat la plus ambitieuse possible. Selon une étude parue le 12 octobre, plus de 40 % des plates-formes de glace de l'Antarctique, qui se trouvent en bordure de la calotte glaciaire et freinent son écoulement, ont rétréci entre 1991 et 2021 et près de la moitié ne montrent “aucun signe de récupération”. Par ailleurs, en septembre, au terme de l’hiver austral, la banquise antarctique avait atteint sa plus faible étendue maximale annuelle jamais enregistrée. Si elle ne contribue pas à l’élévation du niveau marin, la banquise, en encerclant le continent Antarctique et la calotte glaciaire qui le recouvre, joue un rôle de bouclier en empêchant la mer de venir la grignoter ou la déstabiliser.